Le réchauffement climatique menace l’abondance de certaines richesses naturelles comme l’eau à travers le monde. Et pourtant, malgré la crise pressentie de cette ressource, ce présage ne semble pas inquiéter les gabonais qui s’illustrent en tout temps et en tout lieu dans un gaspillage notoire de l’eau potable.
Pour connaître l’importance de quelque chose il faut l’avoir perdu, rappelle l’adage. C’est à leur dépens que les Gabonais comprendront certainement cet adage. La population gabonaise attend-t-elle de valoriser cette ressource dont elle jouit en abondance lorsqu’elle connaîtra la situation de certains peuples vivant en zones désertiques ou sèches ? Certes dans le cas du Gabon, il paraît presqu’illusoire d’entrevoir une crise de l’eau. Mais rien n’est irréversible, au regard des bouleversements qui affectent la planète sous l’effet du changement climatique.
Ainsi, s’il est impossible de prédire une future pénurie d’eau au Gabon, la réalité quant à elle, est telle que l’accès à l’eau potable en zone urbaine notamment devient de plus en plus une problématique, affectant le quotidien des populations. En effet, l’exode rural, source de l’accroissement des populations des grandes villes gabonaises, est l’un des facteurs qui rendent la fourniture en eau complexe. Et pour preuve, sur près d’un million d’habitants coincés à Libreville, plus de 50% n’ont pas accès à une eau potable en permanence.
Aujourd’hui au Gabon, le fossé en matière d’accès à l’eau se creuse un peu plus. De nombreux quartiers et populations sont privés de ce précieux liquide. Suivant les projections des Nations Unies sur la question, cette privation pourrait être au centre des grandes préoccupations des populations à travers le monde. Les Gabonais n’y échapperont pas malgré les caractéristiques géographiques de leur territoire. Pour contourner cette tendance, il faut une prise de conscience collective dans la gestion de cette ressource.
Et pourtant, malgré ce sombre tableau, peu de Gabonais semblent s’inquiéter de l’avenir de l’accès à l’eau en zone urbaine dans leur pays, s’illustrant par une gestion irrationnelle de ce liquide vital. Le constat posé par l’ancien directeur général de la société d’Energie et d’Eau du Gabon (SEEG), Marcellin Massila Akendengue montrait que plus de 87.000 m3 d’eau par jour sur les 230.000 m3 (chiffres de 2019) produit par l’entreprise pour alimenter le Grand Libreville sont perdus dans le gaspillage.
Si les torts sont partagés, les consommateurs ont une grande part de responsabilité dans cet état de fait. Alors que les administrations et autres structures de l’Etat comme les hôpitaux, les camps militaires, les casernes et autres sont pointées du doigt, la responsabilité des populations n’est pas en reste. « Dans les bâtiments publics nous avons des fuites notoires. Il faut commencer à les traiter de manière à ce que nous ayons un peu plus d’eau pour les autres. Ce n’est pas bon de gaspiller l’eau, alors qu’il y en a qui en manque », faisait constater l’ancien directeur général de la SEEG lors d’une sortie médiatique.
Au niveau des populations, les fuites d’eau issues des tuyaux des particuliers et le mauvais usage des pompes publiques remettent en cause la responsabilité des gabonais dans la gestion de cette ressource. En sillonnant quelques quartiers de la capitale Libreville, La Lettre Verte a pu s’imprégner de ce désordre volontaire dans la gestion de cette ressource. Entre des pompes publiques soumises aux caprices des enfants et de l’eau issue des fuites, coulant à même le sol le long des rues sur plusieurs heures, tout semble indiquer que les gabonais ne mesurent pas encore la chance qu’ils ont de jouir aussi facilement de ce bien.
Michaël Moukouangui Moukala