Confrontée à des difficultés de surveillance, la forêt gabonaise est devenue ces dernières années, le théâtre du trafic illégale d’or. De plus en plus grandissant, ce trafic constitue une source d’insécurité pour le pays et participe à la dégradation des écosystèmes naturelles.
S’il paraît difficile d’établir un parallèle avec les autres pays de la sous-région, au Gabon, la réalité montre que ces dernières années, le trafic d’or est en constante augmentation. Après l’arrestation il y a moins d’un an, par les équipes de l’Agence nationale des parcs nationaux (ANPN) conduite par le directeur Technique (DT) de cette agence, Hubert Ella Ekogha, de 35 trafiquants d’or dans le parc national du Mont de Cristal, une nouvelle prise vient d’être effectuée dans la zone de Bakoumba, dans la province du Haut-Ogooué.
Majoritairement des Congolais, des orpailleurs clandestins, entrés illégalement dans le pays à l’afflux de l’or, ont effet été arrêtés suite à une récente mission composée d’un équipage d’agents des parcs nationaux et de la direction de la contre ingérence militaire (B2) sur un site d’orpaillage clandestin dans la zone citée.
Cette énième arrestation fait du Gabon, une zone de trafic privilégiée par les ressortissants de la sous-région, notamment des Camerounais, Congolais, Tchadien, Guinéen et bien d’autres. Les zones de préférences de ces trafiquants sont essentiellement celles reculées telles que les Provinces du Woleu-Ntem, de l’Ogooué-Ivindo ou encore de l’Ogooué-Lolo. Une préférence qui s’explique par la connexion frontalière de ces provinces avec celles des autres pays de la sous-région, facilitant la pénétration des trafiquants sur le territoire national.
Depuis plusieurs années, ce trafic est en constante augmentation. Pour les seules années de 2021 et 2022, ce sont plus de 1000 personnes qui ont été arrêtés dans des sites d’orpaillages tapis dans la forêt. « La majorité écrasante des orpailleurs appréhendés sont des expatriés. Ce sont notamment des sujets camerounais et quelques nationalités disparates, dont des burkinabés et quelques gabonais », décrivait le Colonel Okoye Lengou, Conservateur du Parc national de Mwagna-Mwagna dans la province de l’Ogooué-Ivindo.
Cette forme de criminalité transfrontalière a un coût écologique sur l’environnement et constitue une menace pour la sécurité intérieure, la lutte contre le terrorisme et le trafic de ressources naturelles au niveau national. « On peut constater de nombreux dégâts écologiques. Si vous observez bien vous allez constater que même le lit de la rivière a été modifié. Cela a des impacts sur plusieurs espèces de la flore, mais également de la faune qui y vit. On voit donc quels sont les impacts dommageables sur l’environnement causés par l’exploitation illégale d’or », indiquait le directeur technique adjoint de l’ANPN en novembre dernier lors de la mission « Wasabi ».
Afin d’encadrer ce secteur, l’Etat a renforcé depuis quelques années les dispositifs juridiques et sécuritaires autour des sites ciblés d’orpaillages. En 2017 par exemple, pour restreindre le champ d’action des trafiquants et booster la filière, sept (7) permis supplémentaires ont été octroyés à quatre compagnies. Malgré ces mesures, le problème des ressources pour mieux assurer les missions de surveillance des par ces nationaux par l’ANPN et des frontières locales par l’armée gabonaise et lutter ainsi contre le trafic d’or, se présente comme l’une des grandes faiblesses dans cette difficile bataille.
D’un point de vue financier, ce trafic compromet les perspectives de l’Etat. Chaque année, d’après les autorités gabonaises, c’est environ 75 milliards de francs CFA que le pays perd à cause de ce trafic. Sans moyens conséquents pour protéger les frontières nationales, les mêmes causes produiront les mêmes effets.
Michaël Moukouangui Moukala