Face à la criminalité environnementale qui bat son plein dans la zone du Tri-national Dja-Odzala-Minkébé, l’Association des communicateurs Ogivins pour la santé et l’action humanitaire (ACOSAH) invite les journalistes à l’action. Pour se faire, a-t-elle proposé aux journalistes, lors d’un atelier de sensibilisaton organisé le week-end écoulé à l’Institut de l’Hygiène, la mise en place d’un Réseau des (journalistes) défenseurs environnementaux luttant contre la criminalité environnementale transnationale dans les forêts du bassin du Congo.
Tri-national Dja-Odzala-Minkébé (TRIDOM), cette appellation ne vous interpelle certainement pas, et pourtant, c’est l’un des complexes transfrontalier d’aires protégées le plus important de la sous-région. Couvrant la zone dite des trois frontières (Gabon, Cameroun et Congo), il fait partie des douze paysages du bassin du Congo désignés comme prioritaires par le plan de convergence de la Commission des forêts d’Afrique centrale (Comifac). Sa superficie s’étend sur 191.541 Km² et comprend 24% d’aires protégées, 65% de concessions forestières et 11% d’espaces de sylviculture, agriculture ou habitat et infrastructures.D’après les scientifiques, le TRIDOM compterait parmi les zones forestières les plus intactes de la planète avec environ 97% de couverture forestière. Ce qui en fait un réservoir de biodiversité et un excellent moteur de régulation du climat.
Malgré ce tableau, la zone fait face à des défis sécuritaires et écologiques importants. Au nombre de ces défis, la criminalité environnementale transfrontalière et ses corollaires, alimentée par les bandes armées qui perturbent l’équilibre des parcs tels que celui de Minkébé situé au nord-est du Gabon. Lors de la table ronde organisée par l’Association des communicateurs Ogivins pour la santé et l’action humanitaire (ACOSAH), le Journaliste Benjamin Evine Binet, par ailleurs Coordonnateur des activités d’ACOSAH et l’Anthropologue Gustave Mabaza ont peint un tableau sombre des mouvements qui s’opèrent au sein de ce parc, avec une forte incidence sur la vie des communautés locales, des peuples autochtones, la disponibilité des ressources naturelles, les écosystèmes, les conflits sociaux et le financement illicite des activités au sein de la sous-région. L’Anthropologue a d’ailleurs appelé le gouvernement gabonais à agir, en renforçant le volet sécuritaire au niveau de cette frontière. « Le Gabon gagnerait à avoir une présence effective à ses frontières », a fait savoir Gustave Mabaza.
Les Journalistes invités à l’action
Le parc de Minkébé, dans la partie gabonaise, semble être celui qui souffre le plus des trafics qui s’opèrent au sein de la zone dite des trois frontières. Une possibilité qui s’explique par de nombreux facteurs endogènes. Entre autres, la porosité des frontières gabonaises, le manque des structures de surveillance, les sous-effectifs, notamment des personnels de l’Agence nationale des parcs nationaux (ANPN) et des Forces de sécurité et défense, et acteurs de la conservation affectée, le sous-peuplement des communautés locales et peuples autochtones au niveau de cette localité et la corruption qui gangrène fortement dans cette zone. Pour exemple, s’agissant de la question de la représentativité des populations (Bantou et Pygmées), alors que plus de 200.000 habitants/tes Baka et Bantou, vivant principalement aux alentours des aires protégées de la zone frontalière ont été identifiés par la Comifac, le Gabon en compte moins de 10.000 individus.
Pour lutter contre les défis liés à la conservation de ce territoire, l’ACOSAH lance un Réseau des défenseurs environnementaux luttant contre la criminalité environnementale transfrontalière dans les forêts du bassin du Congo. Mise en place grâce au financement de la France via son Fonds équipe France (FEF) et la Global Initiative, ce projet qui va durer deux ans permettra de s’attaquer à des problèmes communautaires urgents dans le département de la Zadié. Au total, quatre villages sont ciblés par ce projet. Ces villages sont : Ekata, Imbong, Zoula et Séla-Endounga. « C’est un projet à fort impact communautaire et nous pensons qu’il aura plus d’effet si les médias s’impliquent, parce que la question de la lutte contre la criminalité environnementale se joue à tous les niveaux et nous faisons davantage pour informer les communautés. Ce qui explique que nous informons l’opinion dans l’ensemble et offrons aux décideurs un outil d’aide à la décision, à travers l’implication des médias », a fait savoir Benjamin Evine Binet.
Mise en place d’un Réseau des journalistes
Pour inscrire dans la durée et dans le temps l’action des journalistes dans la lutte contre la criminalité environnementale nationale et transfrontalière, le Réseau des défenseurs environnementaux luttant contre la criminalité environnementale transfrontalière dans les forêts du bassin du Congo va s’enraciner. « Le réseau des journalistes environnementaux va être mis en place au Gabon. De telles occasions sont indispensables pour raffermir les liens, pour apporter davantage de connaissances et pour vulgariser le combat de la lutte contre la criminalité environnementale Transnational. Les médias gabonais choisis, l’ont été pour leur attachement aux questions de protection de l’environnement, pour la qualité des médias dans lesquels ils officient et pour leurs disponibilités à mener ce combat», a ajouté Benjamin Evine Binet.
Pour les journalistes bloggeurs ayant pris part à la sortie de l’ACOSAH, la nécessité de multiplier ce type de rencontre et l’action ont été mises en avant comme priorités. Certains ont même évoqué la nécessité d’un vrai engagement des journalistes sur les questions touchant l’environnement, eu égard à l’écho de l’Anthropologue Gustave Mabaza qui, lors de sa prise de parole, a invité les journalistes à faire des investigations sur le terrain pour documenter ce type de trafic. Son écho n’est certainement pas rentré dans l’oreille des sourds.
Michael Moukouangui Moukala