Alors que la 20ᵉ Conférence des Parties (CoP20) à la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES) se tiendra à Samarkand, en Ouzbékistan, du 24 novembre au 5 décembre 2025, les autorités scientifiques des États membres de l’Union européenne (UE) ont initié des consultations avec les pays de l’Afrique centrale pour évaluer la pertinence d’inscrire plusieurs espèces de bois d’œuvre à l’Annexe II de la CITES.
L’Entandrophragma spp. – Tiama (E. angolense), Kossipo (E. candollei), Sapelli (E. cylindricum), Sipo (E. utile), ainsi que l’Okoumé (Aucoumea klaineana) sont les espèces ciblées dans le cadre de cette collaboration. L’objectif, notamment pour la partie européenne étant de recueillir les avis des pays de l’aire de répartition sur l’opportunité d’une telle inscription, ainsi que sur l’annotation la plus appropriée. Ces discussions expliquent, le report par l’Union européenne de son projet de permis d’importation des bois en provenance de l’Afrique centrale sur son sol à une échéance ultérieure. Ce report a été fait sur la base des éléments présentés par les États de l’aire de distribution des espèces ciblées.
Toutefois, l’objectif de les aligner à l’Annexe II de la CITES demeure intact, en particulier parce que ces espèces sont déjà listées à l’Annexe D du règlement européen sur le commerce des espèces sauvages. L’alignement pourrait ainsi intervenir lors de la Cop21 en 2028. D’où l’importance pour les deux parties de poursuivre le renforcement des éléments de légalité, de durabilité et de traçabilité.
En effet, l’inscription d’une espèce à l’Annexe II de la CITES impose, pour sa commercialisation, la délivrance de permis d’exportation par le pays d’origine, et, pour l’accès au marché européen, l’obtention d’un permis d’importation. Depuis l’entrée en vigueur des inscriptions des espèces des genres Afzelia, Khayaet Pterocarpus qui s’ajoutent à celles déjà inscrites comme Pericopsis elata, Guibourtia spp. et d’autres essences de bois d’œuvre, plusieurs pays exportateurs ont mené les études nécessaires pour émettre des Avis de Commerce Non Préjudiciable (ACNP), fixé des quotas et délivré des permis d’exportation. C’est le cas de ceux de l’Afrique centrale dont les discussions ont eu lieu cette fin d’année.
Cependant, ces exigences ne s’accommodent pas toujours aux défis auxquels sont confronté les pays de la sous-région. Méconnaissance du contexte d’aménagement forestier en Afrique centrale par certaines autorités CITES européennes, Non-reconnaissance des ACNP produits par les pays exportateurs, bien que ceux-ci respectent les exigences de la CITES, Manque de transparence sur les critères et paramètres appliqués par les autorités CITES européennes pour évaluer les demandes de permis, Faible communication entre les autorités CITES européennes et les pays exportateurs, de nombreux griefs sont reprochés aux autorités de l’UE face à la volonté d’implémenter une nouvelle règle d’importation des bois vers son territoire.
Face à ces défis, pour reprendre l’Association professionnelle représentant le secteur privé des forêts tropicales (ATIBT), l’Union européenne a récemment clarifié ses attentes et procédures par la Notification aux Parties No. 2024/138, qui détaille les mesures en vigueur pour l’importation de bois vers l’UE ainsi que le processus de réexamen des critères de durabilité appliqués aux ACNP relatifs aux bois. Bien que les recommandations générales, la documentation requise et les critères actuellement appliqués soient désormais mieux définis, il est regrettable de constater que ces exigences ont été élaborées et mises en œuvre sans consultation préalable des parties. Par ailleurs, les modalités d’application et les paramètres spécifiques utilisés pour évaluer les dossiers et la délivrance des permis demeurent insuffisamment transparents.
Pour répondre à ces enjeux, les pays exportateurs devront se mobiliser dès le début de l’année prochaine pour trouver les canaux de communication nécessaires et obtenir des clarifications sur les attentes européennes. Car n’oublions pas que l’entrée en vigueur de cette mesure devrait avoir des graves répercussions économiques et sociales dans le secteur forestier de la sous-région.
Séraphin Lame