Plusieurs massifs forestiers du bassin du Congo sont menacés par l’augmentation des pressions démographiques et climatiques à venir. C’est l’alerte donnée par une récente étude internationale publiée dans la revue Nature par des chercheurs de l’IRD et du Cirad.
République démocratique du Congo (RDC), République du Congo, Gabon, Cameroun et République centrafricaine (RCA), aucun de ces pays formant le bloc forestier du bassin du Congo n’est à l’abri de l’alerte donnée par des chercheurs internationaux. Ces derniers confirment ce que tout le monde soupçonne depuis quelques années : la vulnérabilité des forêts africaines face aux pressions démographiques et climatiques à venir.
Pour déboucher sur ce constat, les chercheurs de l’IRD et du Cirad ont compilé des données portant sur l’inventaire de plus de 6 millions d’arbres répartis dans les cinq pays cités. L’enjeu était de réaliser les premières cartes continues de la composition floristique et fonctionnelle de ces forêts, afin d’identifier les massifs les plus vulnérables et d’en assurer une gestion durable.
Un travail titanesque, d’autant plus que, pour se référer à Maxime Réjou-Méchain, écologue à l’IRD et premier auteur de l’étude, « le massif forestier d’Afrique centrale est loin d’être un tapis vert homogène.» Celui-ci présente une grande « diversité de types de forêts » aux caractéristiques différentes.
Une diversité qui selon lui, « (…) s’explique par les différents types de climats (humidité, température, taux d’évapotranspiration, quantité de pluies), de sols, par l’histoire de la flore africaine mais aussi par l’ampleur des activités humaines qui perturbent les forêts depuis des millénaires, comme l’agriculture itinérante ».
Les causes de cette vulnérabilité perçue sont entre autres, la pression démographique en perspective en lien avec les activités humaines telles que l’agriculture, et les changements climatiques qui menacent l’équilibre des écosystèmes forestiers. Il faut cependant noter comme l’explique le Pr. Bonaventure Sonké, botaniste à l’Université de Yaoundé 1 et co-auteur de l’étude, que le phénomène annoncé pourrait varier d’un pays à un autre. « Les marges forestières du Nord et du Sud de la région, les forêts atlantiques et la plupart de celles de la République Démocratique du Congo, pays qui englobe plus de la moitié des forêts d’Afrique centrale, comptent parmi les plus vulnérables ».
Au-delà de la simple formalité scientifique mettant en exergue le travail des chercheurs, cette étude interpelle les décideurs sur le bien-fondé d’agir en accentuant les politiques de protection des écosystèmes fragiles. En effet, explique le Pr. Alfred Ngomanda, écologue au CENAREST (Gabon) et co-auteur de l’étude, « la diversité des types de forêts d’Afrique centrale offre un large panel de réponses potentielles aux changements globaux. Elle est donc essentielle à prendre en compte dans le cadre des politiques de gestion durable et de lutte contre le réchauffement climatique ».
Ce n’est cependant pas la première fois que des chercheurs mettent en exergue la vulnérabilité des forêts d’Afrique centrale face au poids démographique et climatique. En octobre 2020, une étude des chercheurs gabonais en partenariat avec des chercheurs de l’université de Stirling alertait sur le même phénomène, en mettant l’accent sur le lien entre la baisse de la production fruitière des arbres et la méforme des éléphants de cette partie de l’Afrique. Les conséquences possibles découlant de ces deux liens doivent être envisagées avec beaucoup de sérieux par les pays cibles.
Michaël Moukouangui Moukala