Au Gabon, Lee White était le dépositaire de la diplomatie verte, mais son parcours au sein du gouvernement n’a pas autant duré que son engagement écologique dans le pays.
En 2019, lorsque Lee White, scientifique britannique spécialisé en zoologie et écologie, prend les rênes du ministère des Eaux et Forêts rebaptisé à l’époque pour tenir compte des enjeux mondiaux en matière de lutte contre les changements climatiques et préservation de la biodiversité, le secteur de la foresterie est dans un état lamentable, terni par des scandales de corruption. L’une d’elle, le Kevazingogate qui avait d’ailleurs précipité l’arrivée du britannique de la Lopé au sein du gouvernement.
Durant son parcours au sein du gouvernement, Lee White n’a jamais manqué de mettre en avant les raisons qui ont prévalu à sa nomination. A qui voulait l’entendre il le faisait savoir. En plus de la solide expérience qu’il revendiquait en matière de connaissance du secteur forestier local, Lee White avoir été nommé « pour essayer de mettre de l’ordre dans le secteur ». Un leitmotiv qui s’est durant ses années de gouvernance moins manifesté, en comparaison avec la diplomatie verte dont sans aucune opposition, il était le meilleur ambassadeur. Leadership écologique, adhésion du Gabon au Commonwealth, promotion des crédits carbone, attraction des bailleurs des fonds via des partenariats spécifiquement focalisés sur la préservation de l’environnement, l’Okandais de la Lopé était parvenu à un dépassement de ses missions pour élever le Gabon au rang de leader mondial en ce qui concerne les questions de préservation de l’environnement.
Parallèlement, il était aussi la cible de la société civile et des partenaires sociaux qui l’accusaient de brader les terres gabonaises et d’entretenir la corruption dans le secteur. En 2022, autour de juin, la disparition mystérieuse de 15 000 m3 de grumes dans un parc à bois à Sindara, dans la province de la Ngounié, établissait un lien entre Ghislain Moussavou, le directeur général des Forêts et Lee White tout en levant le voile sur l’irréprochabilité du britannique. A cette déconvenue accusatrice, s’est empilée une série d’autres accusations qui pointaient sur Lee White et ses collaborateurs. Toutes ou en grande majorité formulées par le Syndicat national des professionnels des eaux et forêts (Synapef) et mettant en avant la « corruption », la « complicité d’exploitation illégale de bois » et de « détournement de fonds ».
Malgré ces griefs souvent formulés sous le vocable d’accusation par la société civile et les syndicalistes du ministère qu’il dirigeait, Lee White ne cachait pas ses projets pour le Gabon allant du développement de la foresterie à la lutte contre les changements climatiques, la préservation de la biodiversité au niveau local, la valorisation des crédits carbone à la lutte contre le Conflit homme faune (CHF). « Si nous laissons la tendance actuelle du réchauffement climatique se poursuivre, déforestation du Bassin Congo, nous nous dirigeons vers une implosion du continent. On peut faire face à ce problème en prenant des décisions fortes. Ce que nous avons fait au Gabon montre que c’est possible. Nous avons développé un modèle pour préserver la forêt », prévenait-il.
Disant souvent mettre son expérience au profit de la cause du développement du Gabon, l’engagement écologique du britannique s’est heurté aux sensibilités locales avec une question qui revenait souvent en prime : « pourquoi c’est un blanc qui dirige le ministère des Eaux et Forêts ? ». Partiellement accepté par une partie de la population, sa présence au sein du gouvernement n’avait pas encore réussie de caution. Il n’a pas fallu longtemps pour voir celle-ci voler en éclat. Le 30 août 2023, avec le changement de régime, son élan « patriotique » pour la cause écologique a été stoppé. Depuis, des ennuis judiciaires pèsent sur lui dans le pays.
Michaël Moukouangui Moukala